Les Hiéroglyphes

À partir de 1950, tout en peignant ses Natures mortes de la réalité, Harburger approche d’une façon intellectuelle le problème de la représentation du réel et invente une manière nouvelle pour mieux encore traduire l’« épiderme des objets » : le hiéroglyphe. Le principe consiste à assembler sur la toile un « échantillon de matière émotive choisie » et d’y superposer un dessin linéaire qui vient servir de commentaire – un idéogramme qui permet en quelque sorte de réidentifier l’objet. Avec cette « écriture picturale » le peintre explore les lois de l’apparence, abandonne les traditionnels jeux d’ombre et de lumière pour réduire les objets à une expression plane et à leur équivalence symbolique, sans pour autant perdre la référence à la réalité.

Les idéogrammes ne relèvent pas d’un ajout rapide de la part du peintre, mais d’une exigeante méditation dont témoignent les croquis qui les précèdent, lieux de confrontations de toutes les combinaisons possibles.

Dans certains de ses hiéroglyphes, Harburger se plaît à ajouter à la transcription peinte d’objets et à leurs idéogrammes de vrais objets, cuillères en bois ou écumoires en métal, vieilles éponges ou brosses à récurer, plats en aluminium ou couvercles de casseroles. Ces hiéroglyphes, dans lesquels il introduit des éléments non plus peints mais directement collés sur la toile, sont le point de départ d’une nouvelle formulation de son naturalisme, que l’artiste a regroupés sous l’appellation Abstractions concrètes.

Cette composition procède à la fois de l’abstraction concrète, avec son paillon et son vrai couteau, et du principe du hiéroglyphe. Mais ici l’artiste a substitué au dessin de ses idéogrammes de vrais morceaux de cordes, dont les deux premiers viennent suggérer le dessus du verre et celui du pichet, le troisième la vue de côté du pain.

Paillon garni sur table, 1973,
collage sur toile, corde, paille, couteau, bois,
65 x 54 cm.
Paris, collection particulière.